Betty et Marie expliquent le procédé de perforation des briques... et se font aider par un visiteur. (Photo DNA) |
« Petites, on jouait à cache-cache
dans le four à briques... » Marie et
Betty, petites-filles du
dernier tuilier de la famille Sonntag, ont bien grandi depuis. Et
maintenant, ce sont elles qui font redécouvrir le patrimoine
de leur
famille, qui est aussi celui de tout le village.
Un patrimoine
rouge brique et qui colle aux basques, comme la terre glaise.
« La
carrière à ciel ouvert, derrière les
bâtiments, s'est mécanisée
après
guerre » expliquent les soeurs, à tour de
rôle. La machine,
monstre désarticulé entièrement
couvert de rouille, expose aux
frondaisons ses entrailles de chaînes et de poulies. Ici et
là, des
rails - redécouverts avec l'aide de la
société d'Histoire de
Mutzig et environs - défigurés par un
arbre jeunot.
« 1,8
millions de briques
pleines et 0,9 millions de
briques perforées par an »
« Alors,
les godets prenaient la terre dans ce sens... Euh, non.
Plutôt dans
l'autre... » Les frangines ne sont pas
très calées mécanique. Et
sont vite
« récupérées »
par des visiteurs plus à fond dans
les boulons. Au final, tout le monde s'y met dans les supputations.
Avides de questions, ils sont une petite vingtaine à
être venus visiter
la tuilerie « qui n'en est pas une, puisqu'en fait,
ce sont des
tuiles qu'ils faisaient, non ? »
« Ils fabriquaient
quelques tuiles, mais c'est toujours resté
manuel. » Ça, elles
savent. Il y a quatre étapes dans la fabrication
d'une
brique : extraction de la terre, fabrication,
séchage et cuisson.
Chacune est expliquée avec force schémas dans un
film projeté avant la
visite. L'on y voit le procédé du four tournant
Hoffmann, installé à
Still en 1865, chauffant progressivement à 1000°C.
« En pleine
activité, 1,8 millions de briques pleines et 0,9 million de
briques
perforées étaient produites par
an. »
Chaque jour, les
ouvriers enfournaient 10 000 nouvelles briques dans le four
allumé
de mars à la Toussaint. Elles y restaient une semaine, le
temps de
subir le « feu tournant ».
Parmi la dizaine
d'ouvriers de l'entreprise, beaucoup d'Italiens, qui ont
apporté leur
savoir-faire et ont fini par s'installer à Still. Des
prisonniers
allemands ont aussi travaillé là.
« Il y en a un qui s'est
échappé... Et on est en contact avec
lui ! ». Les deux soeurs
ont aussi récupéré avec joie un film
tourné par un ouvrier émigré aux
États-Unis, et revenu plus tard armé d'une
caméra. « Un document
précieux. »
« La
famille a toujours voulu
conserver ce patrimoine »
Aujourd'hui,
il reste encore beaucoup de points à éclaircir,
tant sur les procédés
de fabrication que sur le quotidien de la tuilerie. Les
bâtiments sont
en quasi-ruines, même si quelques installations ont d'ores et
déjà été
sauvées. « Les Sonntag sont là
depuis plusieurs générations... La
famille a toujours voulu conserver ce patrimoine. »
En
1962, la tuilerie a été fermée
« du jour au lendemain », ce
qui explique que tout ait été laissé
en l'état. Hormis les dommages du
temps, l'ensemble fait encore l'effet, plus de quarante ans
après,
d'avoir été abandonné dans la
précipitation. Comme si ouvriers et
contremaîtres venaient à l'instant de jeter leurs
gants, brouettes et
briques...
J. R.
© Dernières Nouvelles d'Alsace - Lundi 18 septembre 2006 |
418
Quelques manifestations ont sans doute pâti de la météo, mais, globalement, les journées du patrimoine ont encore été couronnées de succès. Ainsi à Still, où la tuilerie ouvrait ses portes au public pour la première fois depuis sa fermeture en 1962. Marie et Betty, petites-filles du dernier tuilier de la famille Sonntag, et la société d'histoire de Mutzig et environs ont accueilli 418 personnes sur le site durant le week-end.
© Dernières Nouvelles d'Alsace - Mardi 19 septembre 2006 |